11/12/2013
Quelles sont les caractéristiques des meilleurs mécènes?
Familles en affaires
C’était le 15 novembre dernier, lors de la journée internationale de la philanthropie, à Québec que Mme Hilary Pearson, présidente de Fondations Philanthropiques Canada, offrait un discours senti sur l’état de la philanthropie au Canada. En voici quelques extraits :
« Quelles sont les caractéristiques des meilleurs mécènes?
Les meilleurs mécènes sont toujours curieux. Ils veulent savoir non seulement ce qu’un organisme fera de leur don, mais également pourquoi ils privilégient une stratégie par rapport à une autre. De plus en plus de donateurs, surtout les grands donateurs, veulent savoir comment leur temps et leur argent contribueront au bien-être de la collectivité. Une question encore plus importante est de savoir quelle intervention est la plus efficace en termes de temps, de ressources et d’énergie pour assurer un impact durable. Les meilleurs philanthropes posent beaucoup de questions.
Et ils recherchent des preuves. Ils veulent savoir ce qui fonctionne. Ils savent, par exemple, qu’on ne peut pas affirmer que la stratégie A est mieux que la stratégie B sans l’analyse des données. C’est pourquoi de nombreux organismes de bienfaisance travaillent d’arrache-pied afin de recueillir des données et des preuves solides pour obtenir le soutien des donateurs.
Finalement, les meilleurs mécènes s’interrogent sur l’impact de leur don.
Les preuves vont de pair avec l’impact et, preuves à l’appui, on peut décrire un impact précis. À court terme, on peut chiffrer l’impact, par exemple en citant le nombre d’enfants en bas âge qui ont accès à des programmes préscolaires, ou le nombre de familles qui se présentent à des cliniques de santé publiques. À long terme, on peut mesurer l'impact à plus grande échelle en tant que bienfaits pour la société. Dans ce cas, la mesure de l'impact pourrait être la baisse des taux de décrochage scolaire dans les régions où les jeunes enfants sont inscrits dans des programmes préscolaires, ou la baisse des taux de maladies chroniques dans les quartiers avec des cliniques de santé publiques.
Plus on définit l’impact de façon rigoureuse, plus c’est convaincant.
Une des plus grandes fondations familiales au Canada est ici, au Québec, soit la Fondation Lucie et André Chagnon. Comme vous le savez tous, la Fondation Chagnon a comme mission de prévenir la pauvreté en contribuant à la réussite éducative des jeunes Québécois. M. Chagnon et sa famille savaient depuis le début qu'ils voulaient faire une différence dans ce domaine. Mais ils n'ont pas commencé avec toutes les réponses. Ils étaient à la fois curieux par rapport à la philanthropie et à cette problématique excessivement complexe dans laquelle ils souhaitaient s’investir. Donc, au début, la Fondation s’est posée de nombreuses questions et s’est renseignée auprès des autres philanthropes au Canada et aux États-Unis sur les pratiques les plus efficaces en la matière. La fondation a également cherchée des preuves. Inspirée par d'autres fondations telles que la Fondation de la famille JW McConnell et la Fondation Annie Casey aux États-Unis, elle en est venu à la conclusion que les interventions les plus efficaces devaient se réaliser dans la communauté même. Elle a donc établie un partenariat avec le gouvernement du Québec afin de soutenir la mobilisation locale et régionale autour des facteurs de la réussite éducative que sont le développement de la petite enfance, les saines habitudes de vie et la persévérance scolaire. Grâce à ce partenariat extraordinaire, qui durera 10 ans, et qui engage les partenaires à verser 200 millions $ pour la cause, la fondation Chagnon et le gouvernement sont en mesure ensemble d’accumuler des données, et de partager les résultats de leurs réalisations en cours.
À l'autre extrémité, nous avons une famille de philanthropes comme la Fondation de Gaspé Beaubien de Montréal, qui travaille à plus petite échelle que la fondation Chagnon. Mais une fois de plus, cette famille de philanthropes a été particulièrement efficace en raison de leur curiosité et leur détermination d’avoir un impact. Il y a huit ans, ils ont été invités à faire un don pour l'achat d'équipement médical pour un petit hôpital dans les Laurentides. Curieux, ils ont demandé aux administrateurs de l'hôpital ce qui était le problème le plus pressant à l'établissement. La réponse : l'hôpital était en difficulté financière en partie en raison de problèmes de gestion et de communication ce qui faisait que l’hôpital avait de la difficulté à atteindre ses objectifs. Les de Gaspé Beaubiens ont constaté qu’ils pourraient être des philanthropes beaucoup plus efficace en aidant l'hôpital à atteindre ses objectifs plus larges. Donc, sur une période de plusieurs années, ils ont soutenu un processus de dialogue, de gestion et de formation des professionnels de l’hôpital à tous les niveaux. Ils ont rassemblé des preuves sur l’impact de leur intervention en réalisant une évaluation menée par les Hautes Études Commerciales. La Fondation de Gaspé Beaubien est aujourd’hui avide de transférer les connaissances acquises et elle fait la diffusion des résultats, fort positifs, avec l'objectif ultime d'améliorer le domaine de la sante à travers le Québec, en appliquant un modèle qui a fait ses preuves.
Et il existe d’autres philanthropes curieux et engagés qui font des choses à Montréal.
Que ce soit la Fondation Brian Bronfman qui travaille à la création d’un réseau de conciliateurs, la Fondation Graham Boeckh qui développe une nouvelle approche pour l’intervention préventive chez les jeunes atteints de maladie mentale, ou encore la Fondation J. Armand Bombardier qui investigue la capacité des organisations communautaires à gérer et manager. Il y a probablement trop d’histoires à vous raconter, mais j’ai vu et entendu assez aujourd’hui pour vous confirmer ma conviction que la philanthropie privée est bien un catalyseur critique dans la croissance et la progression des organisations et des idées. »